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Jeunes et agriculture, pourquoi le désamour continue

Minata Coulibaly

En 2008, une crise alimentaire secoue le monde. Le prix des denrées alimentaires connaît des hausses spectaculaires et engendre des tensions politiques et sociales. Les “émeutes de la fin” ont été les qualificatifs des manifestations organisées de par le monde par les populations pour crier leur désespoir. Cette crise a permis de comprendre une fois de bon que l’autosuffisance alimentation des populations loin d’être un vain mot doit être une réalité concrète ! Un dicton populaire ne dit-il pas que “ventre creux n’as point d’oreille” !

Le réinvestissement dans l’agriculture surtout au sud du Sahara devient prioritaire pour juguler cette spéculation sur les prix des denrées alimentaires. Ce regain d’intérêt pour l’agriculture s’est accompagné d’investissement et d’appui pour juguler les effets de la crise au bonheur des acteurs de ce secteur. En Afrique de l’Ouest particulièrement, les acteurs du monde paysans n’avaient de cesse d’interpeller sur l’abandon dont était victime le secteur agricole depuis belle lurette.

Du neuf avec du vieux ?
Parmi les solutions multiples à une agriculture performante inciter les jeunes (diplômés ou pas) au retour à l’agriculture. D’une manière générale la moyenne d’âge de la population agricole tourne autour de 50 ans. On a coutume d’entendre dire que l’Afrique est nourrit par des vieux ! Inverser la tendance ! Ramener les jeunes aux métiers agricoles n’est pas nouveau en soi. Des expériences et des dizaines existent avec des fortunes plus ou moins diverses ! Pour attirer d’avantage de jeunes à l’agriculture, des nouveaux concepts ont émergent au fils des ans et des réalités. Parmi ces modèles et concepts en vogue, notons celui de l’incubation agricole.

Pourquoi l’incubation agricole pour jeune ?
Permettre aux jeunes d’accéder à des conseils techniques, aux informations utiles pour le développement de son entreprise est un des postulats de départ. Les difficultés des jeunes entrepreneurs étant souvent le manque de compétence et l’accès aux financements. A l’occasion de cette 7ème semaine des sciences agricoles à Kigali au Rwanda, des modèles de centre d’incubation ont été présentés. Soutenu par des instituts de recherche, des consortiums publiques/privés l’objectif de ces incubateurs est de développer l’entreprenariat des jeunes. Du Mali en passant par le Ghana, le Kenya et l’Uganda les incubateurs sont prises d’assaut par les jeunes. Au bout du processus d’incubation très variable selon les pays et les projets agricoles, les jeunes dispose de leur entreprise agricole.

Incubateurs agricoles : du temporaire au permanant ?
L’incubation est perçue comme un tremplin, une étape plus grande dans la création d’entreprises agricoles. Beaucoup d’appelés peu d’élue ; voilà en quoi se résument la réalité de ces centres. Les disponibilités de place et de moyens limitent le nombre de candidats. En effet la plupart des centres sont subventions par des projets. Telle est la première limite du modèle d’incubation vu le nombre de jeunes diplômés qui rejoignent le marché du travail en Afrique subsaharienne.

Second bémol, le caractère temporaire de l’incubation s’amenuise. En effet pendant la période d’incubation, certains projets agricoles accèdent aux financements, aux facilités pour développer leurs activités. Mais une fois la période de l’incubation terminée, beaucoup de projets se retrouvent sur le carreau. Les centres d’incubations jouent encore le rôle de « parrain » pour l’accès aux financements. C’est pourquoi certains participants n’ont pas manqué de railler en disant que beaucoup de jeunes ne sont pas indépendants des centres !

Mais pour Sam Turyatunga, un jeune du centre d’incubation de l’Uganda, très fier de son parcours pense que le problème se trouve ailleurs. Pour ce dernier, c’est le manque de suivi et d’évaluation des projets une fois hors du centre d’incubation. En outre les incubateurs ne travaillent ne travaillent pas en réseau une fois sortie du centre. En effet la vie après incubation présente des réalités auxquelles certaines jeunes ne veulent pas y faire face.

Ce dernier pense que c’est bien de montrer ce modèle en exemple, de voyager à des conférences mais il faut résoudre la question du financement. Selon Sam,   il n’est pas rare de voir des incubés retourner sur le marché de l’emploi grossir le rang des demandeurs. A se demander si ces derniers incubés avaient vraiment la trempe d’entrepreneur, car comme le dit un sage, on ne peut pas tordre le bois sec ! L’entreprenariat c’est du risque, surtout en agriculture. Il faut aimer et persévérer sinon vive le désarroi!

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